Uite.ci : Prenant de l’avance sur le calendrier, l’Association des Antillais et Guyanais de Côte d’Ivoire (Aag-Ci), a célébré la journée de la Commémoration des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions, le 7 mai 2022 à l’Institut français à Abidjan-Plateau. Un contenu centré autour du rappel des mémoires, dont fait partie intégrante la musique.

Placée sous le thème : « Musiques et danses aux Antilles, de l’esclavage à nos jours. », la 6ème édition de la Commémoration des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions, a été célébrée par l’Aag-Ci à Abidjan, le 7 mai 2022, au lieu du 10 mai, sa date officielle. La raison de cet avancement de date, est que l’Institut français a été réservé pour les besoins du Festival d’Anoumabo, du groupe Magic Système.
Le rappel de ces moments de servitude gratuite, pendant lesquels le Noir était considéré comme une marchandise, utilisable à loisir et corvéable à merci, a été fait ce jour-là, par la musique, la danse, l’exposition des objets usuels de l’époque et d’aujourd’hui, un film, une communication faite par le vice-président de cette association, Georges Ravoteur, une dégustation de mets et de boisson des îles.
Sur fond de la musique des groupes caribéens, avec en grande attraction les tubes de Kassav, les visiteurs ont apprécié les photos commentées, les vêtements ayant traversé les temps, la visite guidée des différents tableaux, etc. Dans son mot de bienvenue aux visiteurs, Mme Rollande Etté, présidente de l’Association des Antillais et Guyanais de Côte d’Ivoire, a mentionné : « Nous tenons à commémorer cette journée, parce qu’elle est la mémoire de notre mémoire. La journée des mémoires justifie par conséquent la présence du passé dans notre présent, témoins de l’expérience que nous sommes tous porteurs et enrichis de notre conscience collective. ». Et de poursuivre : « C’est donc un moment de souvenirs qui renvoie beaucoup de choses à notre collectivité d’Afro-descendants. ».
Jacob Desvarieux et le groupe Kassav honorés

Les quatre raisons du thème
Pour la présidente de l’Aag-Ci, le thème de cette édition a été choisi pour quatre raisons principales. Ce sont pour la première, de rendre hommage à Jacob Desvarieux, un musicien talentueux, qui avec son groupe Kassav, a fait danser des millions d’habitants de la planète, dont des Ivoiriens. La deuxième raison est de magnifier la musique et la danse, les seuls bagages des esclaves. Car, étant captifs et biens-meubles, les esclaves ne possédaient rien.
Ainsi donc, venant d’horizons différents, ils n’avaient pas grande chose en commun, si ce n’est que ce qu’ils avaient dans leur tête et dans leur cœur. La musique et la danse ont donc été le premier moyen d’échanges et de communication des esclaves. Elles étaient tout d’abord un moyen de résistance et de survie. Ce sont donc deux éléments fondateurs de la culture musicale de ces captifs qui émerge de la plantation. La troisième raison du choix du thème, est que la musique et la danse sont les premières victoires symboliques sur la société esclavagiste. Les témoignages indiquent que de nombreuses pratiques ont été instituées par les maîtres pour interdire ces deux instruments d’expression. Le quatrième argument de ce choix, est que la musique des descendants d’esclaves traduit toutes les nuances de la société post-esclavagiste. Elle résulte de plusieurs influences, avec une base permanente, constituée par le son des tambours, issus de toutes les danses traditionnelles de la Caraïbe. Même si la musique a subi l’influence des musiques populaires pratiquées par les colons, le fond basique est présent. Pour souligner l’importance de ce rappel des mémoires, la marraine, Me Christine Nanou Adou, elle-même petite fille d’un descendant d’esclaves, a souligné : « Je crois pouvoir dire que l’événement qui nous réunit ce jour, reste sans nul doute un événement historique. Oui, la nécessité de se souvenir de la traite des esclaves s’impose pour dirigeants et peuples des pays concernés. Non dans une logique de ressentiment ou de vengeance, mais tout simplement pour préserver la mémoire historique d’une tragédie sans nom. ». La cérémonie a vu la participation de la ministre de la Culture et de la Francophonie, Françoise Remarck, du consul de France en Côte d’Ivoire et de nombreuses personnalités des mondes de l’histoire et de la culture.
Clément Koffi